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  • Writer's pictureMe Spiner

La Loi de Finances pour 2020 a été promulguée

Par une décision du 27 décembre 2019, le Conseil constitutionnel[1] a validé les principales mesures instaurées par la Loi de finances pour 2020 (la Loi). Cette Loi a fait l’objet d’une promulgation dimanche.

De nombreux amendements ont été proposés par le Sénat, notamment en matière d’impôt sur la fortune immobilière. Toutefois, ces amendements ont en grande majorité été rejetés par les députés, à l’exception notable du relèvement par les députés de la quote-part de frais et charges sur les plus-values sur titres de participation de 12 à 13,29 %, supprimée par les sénateurs sans être réintroduite.

Parmi ses objectifs les plus souvent cités par le gouvernement, la Loi transforme le crédit d'impôt pour la transition énergétique, supprime la taxe d'habitation et baisse l’impôt dû par les foyers se trouvant dans les tranches inférieures de l’impôt sur le revenu. La Loi introduit aussi plusieurs dispositions intéressant les entreprises et les dirigeants dont vous trouverez un résumé ci-dessous.


Mesures intéressant les entreprises


Dispositions ayant été adoptées sans modifications majeures

La majorité des dispositions intéressant les entreprises ont été adoptées sans modifications majeures.


i. La baisse de l’impôt sur les sociétés est infléchie pour les grandes entreprises

La Loi prévoit que l’abaissement du taux d’impôt sur les sociétés sera infléchi pour les entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaires au moins égal à 250 M €.


ii. Transposition des règles anti-hybrides

Pour rappel, le projet de loi remplaçait les dispositions anti-hybrides actuelles de l’article 212 I, b du Code général des impôts (CGI) par les dispositions anti-hybrides de la Directive dite ATAD (anti-tax avoidance directive)[2]. Ces dispositions visent les montages aboutissant notamment à ce que des paiements transfrontaliers soient déductibles dans un Etat membre sans être imposables dans l’autre Etat, déductibles simultanément dans deux Etats différents, ou encore imposables dans aucun Etat.

En dépit d’une tentative du Sénat d’introduire une exception en faveur du secteur bancaire, les nouvelles dispositions anti-hybrides ont été adoptées sans modification majeure.


iii. Transfert d’un actif isolé

La disposition qui étendait la possibilité d’étaler sur cinq ans de l’imposition des plus-values résultant du transfert vers un autre Etat membre du siège ou d’un établissement d’une entreprise, aux plus-values résultant du transfert d’un actif immobilisé isolé de France vers un autre Etat membre, est adopté sans modifications.


iv. Transposition des Directives relatives à la TVA

Les dispositions de transposition des directives relatives au régime de TVA ont été adoptées sans modifications[3].

Pour rappel, ces directives modifient le régime des ventes à distance. Ce régime autorise les opérateurs à appliquer la TVA de l’Etat membre d’expédition dans la limite d’un seuil de chiffre d’affaires lié à ces ventes à distance fixé par l’Etat membre (35.000 € en France). Ce seuil est dorénavant fixé à 10.000 € pour l’ensemble des Etats membres. La TVA de l’Etat du destinataire sera alors déclarée et acquittée auprès d’un guichet unique situé dans l’Etat membre du fournisseur.

Par ailleurs, les importations de marchandises de faible valeur (inférieure à 150 €) à partir de pays tiers à l’Union européenne seront exonérées de TVA sous condition de déclaration auprès d’un guichet unique.

Enfin, la TVA sera acquittée par les plateformes internet ayant facilité :

- soit les ventes à distance de marchandises importées de pays tiers et de faibles valeurs (150 €),

- soit la livraison de marchandises dans l’Union européenne vendues par un assujetti non établi sur le territoire de l’Union à un non assujetti.

Ces plateformes se verront imposer des obligations spécifiques avec la tenue d’un registre des ventes, afin de faciliter les contrôles.


De même, certaines règles en matière de livraisons intracommunautaires sont simplifiées. Actuellement, lorsque les biens sont expédiés, par un assujetti ou pour son compte, à partir d'un autre Etat membre vers la France, à destination d'un client français chez qui ils sont stockés pendant moins de 12 mois avant d'être acquis par ce dernier, le fournisseur réalise en France une affectation assimilée à une acquisition intracommunautaire soumise à la TVA. Selon la Loi, cette opération doit dorénavant être traitée comme une livraison intracommunautaire exonérée dans l’Etat membre de départ des biens et comme une acquisition intracommunautaire imposable pour l’acquéreur dans l’Etat membre d’arrivée, sous le régime de l’autoliquidation.

Lors d’opérations faisant l’objet de ventes en chaîne, de nouvelles règles vont permettre d’harmoniser les pratiques nationales et faciliter la mise en œuvre de la position de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur l’unicité de l’opération intra-communautaire dans ce cas[4]. Ainsi, la livraison intracommunautaire sera généralement attribuée à la transaction entre le fournisseur et le premier intermédiaire distinct du fournisseur, qui expédie les biens, lui-même ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant pour son compte. A titre d’exception, la livraison intracommunautaire est attribuée à la livraison effectuée par l’intermédiaire qui aura fourni à son fournisseur un numéro de TVA dans l’Etat de départ des biens.


Ces mesures de simplification s’accompagnent d’un amendement qui fait de la fourniture d’un numéro de TVA intracommunautaire par l’acquéreur et la soumission d’une Déclaration d’échange de biens (DEB) des conditions de fond pour l’exonération de TVA.

Dans le contexte des diverses simplifications ci-dessus, la Loi impose des obligations plus étendues aux exploitants d’entrepôts et aux plateformes de ventes en ligne. Elle introduit une liste publique des plateformes qui ne répondent pas aux demandes réitérées de l’administration visant à respecter les règles en matière de TVA.


v. Simplification du recouvrement de la TVA à l’importation

La disposition qui simplifie le recouvrement de la TVA à l’importation en soumettant dès 2022 la déclaration et le paiement par un assujetti suivant les règles de droit commun, auprès des services fiscaux, est adoptée sans modification.


vi. Clarification du régime de TVA des organismes de placements collectifs

La disposition qui prend acte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne[5] en exonérant de TVA l’ensemble organismes présentant des caractéristiques similaires aux organismes placements collectifs français est adoptée sans modification majeure.


vii. Facturation électronique

L’introduction progressive de l’obligation d’émettre des factures électroniques entre assujettis à la TVA est maintenue. Le contenu de ces factures sera automatiquement collecté par l’administration fiscale.


Dispositions ayant fait l’objet d’amendements notables


i. Retenues à la source applicables aux sociétés non-résidentes

En application de l’article 115 quinquies du CGI, les bénéfices réalisés en France par les établissements français des sociétés étrangères sont réputés distribués par ces dernières et soumis en conséquence à la retenue à la source prévue par l'article 119 bis, 2 du CGI. Il est possible toutefois de demander la restitution de la retenue s’il est établi que les distributions effectives par les sociétés étrangères se sont révélées inférieures au montant des bénéfices réalisés en France. Afin de mettre ces dispositions en conformité avec la liberté d’établissement telle que définie par le Conseil d’Etat[6], les sociétés étrangères ont désormais la possibilité d’apporter la preuve que les bénéfices qu’elles ont réalisés en France n’avaient pas été désinvestis de France.

📷De même, la Loi prend acte de la jurisprudence de la CJUE[7] et supprime la retenue à la source prélevée à raison de dividendes de source française versés à une société en situation déficitaire. Les parlementaires ont précisé ce mécanisme, notamment les obligations déclaratives, le suivi permettant le reversement en cas de retour à une situation bénéficiaire et la sanction en cas de manquement, établie à 5 % des montants en report.

Les députés ont restreint ces avantages aux seules sociétés situées dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.


ii. Aménagement des crédits d’impôt recherches (CIR) et innovation (CII)

Le forfait des dépenses de fonctionnement prises en compte pour le calcul du CIR ou CII est abaissé de 50 à 43 %.

Les parlementaires ont introduit certaines restrictions aux dépenses de sous-traitance afin de limiter les sous-traitances successives pouvant donner droit au CIR.


iii. Rationalisation du crédit d’impôt mécénat

Le crédit d’impôt mécénat est bien réduit à 40 % du montant des versements supérieurs à 2 millions d’euros au lieu de 60 % actuellement.

A noter que la base du crédit d’impôt est en principe limitée à 5 ‰ du chiffre d’affaires ou 10 000 €. Les parlementaires ont renforcé ce plafond alternatif en faveur des PME en le relevant à 20 000 €.


Dispositions ayant été ajoutées par les parlementaires


i. La limitation de la déductibilité des charges financières est allégée pour les entreprises « autonomes »

Une disposition de sauvegarde permet à une société d’obtenir une déduction complémentaire de 75 % des sommes excédant le plafond de droit commun, si son ratio d’autonomie financière (fonds propres sur l’ensemble des actifs) n’est pas inférieur à celui du groupe consolidé.

Cet avantage est étendu à l’ensemble des entreprises ne faisant pas partie d’un groupe consolidé et qui ne pouvaient pas, par définition, apporter une telle preuve.

ii. Certaines dispositions intéressant les fusions sont introduites

La loi introduit certains assouplissements au régime fiscal des fusions :

- Le transfert de déficits, de charges financières nettes non déduites et de capacité de déduction est dispensé de l’obtention préalable d’un agrément lorsqu’il concerne un montant total inférieur à 200 000 € ;

- Le régime légal des fusions simplifiées a été étendu aux sociétés sœurs détenues à 100 %. La Loi confirme que le régime de faveur fiscal est applicable à de telles fusions. Par ailleurs, elle en précise les modalités et pose certaines coordinations en matière de calcul de la durée de détention pour l’application du régime mère-fille et du régime du long-terme sur les plus ou moins-values sur titres de participation.

iii. Prorogation du régime des jeunes entreprises innovantes

Le régime des jeunes entreprises innovantes est prorogé jusqu’au 31 décembre 2022.

Mesures intéressant les personnes physiques

Dispositions ayant été adoptées sans modifications majeures


i. Suppression de l’étalement de certains revenus exceptionnels

La disposition qui met fin au régime de l’étalement de l’imposition des indemnités de départ à la retraite a été adoptée sans modification.


ii. Déclaration tacite des revenus

Les contribuables pour lesquels l’administration dispose des informations nécessaires à l’établissement de leurs revenus et qui n’auront procédé, avant la date limite de déclaration, à aucune modification des éléments pré-déclarés par cette dernière, seront réputés avoir souscrit à leur déclaration.

Cette mesure serait applicable aux déclarations de revenus 2019 déposées en 2020.


Dispositions ayant fait l’objet d’amendements notables


i. Domiciliation fiscale en France des dirigeants des grandes entreprises françaises

Le projet de loi prévoyait dès l’origine la domiciliation fiscale en France des dirigeants des grandes entreprises.

Cette disposition a fait l’objet de nombreux amendements afin d’en définir le champ d’application :

- Le chiffre d’affaires des entreprises concernées est abaissé de 1 milliard € à 250 millions € ;

- Les dirigeants disposent de la possibilité de démontrer qu’ils n’exercent pas en France leur activité principale et qu’ils ne sauraient pas par conséquent y être domiciliés, en vertu de cette disposition, en raison d’une activité jugée secondaire ;

- Les membres du directoire sont exclus du champ d’application ;

Cette disposition est applicable dès 2019 pour l’impôt sur le revenu et 2020 pour les autres impositions.

Cette nouvelle règle de domiciliation a été explicitement validée par le Conseil constitutionnel. Elle s’appliquera sous réserve des dispositions des conventions fiscales internationales signées par la France, limitant son impact pratique au seul cas où aucune convention n’est applicable.


ii. Exploitation des données rendues publiques sur les réseaux sociaux

Afin de lutter contre la fraude, le projet de loi de finances introduisait une disposition qui accordait à l’administration fiscale le droit de procéder à un traitement automatique des données publiées sur les réseaux sociaux et les plateformes de mise en relation. Cette approche avait notamment fait l’objet de réserves par la CNIL[8].


Cette disposition a été soumise à la revue du Conseil constitutionnel qui l’a en grande partie validée. En effet, il a considéré que le législateur poursuivait un objet de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales et que les conditions et modalités de collecte et de conservation des données étaient satisfaisantes.

Dispositions ayant été ajoutées par les parlementaires


i. BSPCE

Les sénateurs ont introduit une disposition qui étend le bénéfice des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) aux sociétés résidentes sur le territoire d’un autre Etat membre de l’Union européenne ou d’un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude fiscale.


ii. L’alignement de la retenue à la source pour les non-résidents sur le prélèvement à la source reporté à 2023

La loi de finances pour 2013 prévoyait d’aligner dès 2020 les modalités d’imposition des salaires et pensions de source française versés à des non-résidents sur le prélèvement à la source. Les parlementaires ont instauré un moratoire jusqu’à 2023.

Le barème à trois tranches de 0 à 20 % restera par conséquent applicable aux salaires et pensions perçus par les non-résidents en 2020, 2021 et 2022. Toutefois, le caractère libératoire de cette retenue à la source pour les tranches soumises aux taux de 0 et 12 % est abrogé à compter des revenus réalisés en 2021 et le minimum d’imposition (20 à 30 %), rehaussé par la loi de finances pour 2019, est maintenu, en dépit d’une tentative du Sénat de l’abaisser.


iii. Imposition des contrats d’assurance-vie signés avant 1983

Le régime fiscal des contrats d’assurance-vie signés avant 1983, subit une « petite rétroactivité » fiscale. En effet, les produits de tels contrats étaient totalement exonérés d’impôt sur le revenu, indépendamment de la date de versement des primes.

Pour les primes versées après le 10 octobre 2019, les produits suivront le régime actuel de l’assurance-vie pour les contrats de plus de 8 ans. Ils bénéficient donc d’un abattement annuel (4 600 € pour une personne seule ou 9 200 € pour un couple) et du taux réduit de 7,5 % (12,8 % pour les versements supérieurs à 150 000 €).


iv. Assouplissement du régime fiscal de carried interest

Le régime favorable d’imposition du carried interest était restreint aux équipes de gestionnaires représentant au moins 1 % du total souscription.

Afin de permettre aux équipes de grands fonds de bénéficier d’un tel régime, cette participation plancher a été réduit par les sénateurs à 0,5 % pour les structures d’investissement dont la capitalisation excède le milliard d’euros.


[1] Décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019


[2] Directive (UE) 2016/1164 du 12 juillet 2016


[3] Directive (UE) 2017/2455 du 5 décembre 2017 ; Directive (UE) 2018/1910 du Conseil du 4 décembre 2018


[4] CJUE, aff. C-386/16, 26 juillet 2017, Toridas UAB ; CJUE, C-628/16, 21 février 2018, Kreuzmayr


[5] C-595/13 - Fiscale Eenheid X


[6] CE 10 juillet 2019, Société Cofinimmo, n° 412581


[7] CJUE 22 novembre 2018, C-575/17, Sofina SA


[8] Délibération n° 2019-114 du 12 septembre 2019


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